Ce texte est dédié à Raphaël et à ses parents qui se battent avec un courage et une ténacité remarquables afin d’améliorer la santé de leur fils et faire enfin reconnaître l’origine de ses maux.
Outre le caractère captif de cette population infantile plus facile à atteindre, l'autre raison était la rareté des complications vaccinales décrites dans cette tranche d'âge. Certains médecins, en charge de responsabilités dans cette campagne vaccinale, n'hésitaient pas à forcer la note et à prétendre que le jeune enfant ne pouvait pas se démyéliniser puisqu'il n'avait pas de myéline ou presque : «Il n'y a pas de cas rapporté en dessous de l'âge de 3 ans car le nourrisson n'a pas de myéline ou tout du moins elle est en formation...» (1). Un autre expert, pourtant Professeur de Pédiatrie, prétendait que l'on n'avait jamais observé de cas de démyélinisation « chez l'enfant en-dessous de 7 ans du fait de raisons physiologiques (faible myélinisation) »(2)
L'association REVAHB a eu malheureusement aussi à recueillir quelques observations graves d'affections démyélinisantes du nourrisson. L’une des plus typiques et des plus dramatiques est celle d’un jeune garçon, Raphaël, qui alors âgé de 5 puis 6 mois reçut deux injections successives du vaccin Engérix B. Si la première injection avait déjà donné lieu à des modifications notables et déjà inquiétantes de son comportement, la seconde déclencha dans les jours qui suivirent des troubles de la conscience associés à des spasmes en flexion (forme d’épilepsie spécifique du nourrisson) incessants. Cet épisode neurologique aigu régressif sous un traitement corticoïde et antiépileptique laissera des séquelles neuropsychiques lourdes bien que régressives. L’IRM cérébrale réalisée quelques mois après l’épisode initial avaient révélé un aspect de démyélinisation sus et sous-tentorielle du système nerveux central. Le diagnostic initial évoquait une leuco-encéphalite ou une leucodystrophie selon les neuropédiatres qui s’étaient penchés sur ce dossier.
Devant l’évolution régressive au fil des ans des troubles neurologiques de cet enfant, la disparition de l’épilepsie et l’apparition de progrès constants, une demande de mise à jour de la fiche de Pharmacovigilance du jeune Raphaël avait été demandée. En effet cette fiche concluait initialement dans ces termes «Leucodystrophie d’origine et d’évolution inhabituelle. Il ne s’agit pas d’une démyélinisation». Ce refus de reconnaître à l’époque la possibilité d’une démyélinisation était pourtant en totale contradiction avec les aspects radiologiques des deux IRM réalisées antérieurement et où il était bien écrit « démyélinisation du SNC» (système nerveux central). Ceci était également en contradiction avec l’avis de l’expert neuropédiatre de l’AFSSAPS (4) qui écrivait: «Je crois que l’on peut en tous cas penser qu’il ne s’agit pas d’une leucodystrophie métachromatique ou autre leucodystrophie métabolique, mais plutôt d’une leuco-encéphalite inflammatoire». A force d’insistance, une mise à jour en 2004 prit alors la forme de: « Leucodystrophie ou leucoencéphalite d’origine inconnue et d’évolution inhabituelle. Il ne s’agit pas d’une démyélinisation »
La démyélinisation n’existait donc toujours pas pour l’AFSSAPS en 2004 puis, y fit curieusement son apparition en 2007. On retrouvait en effet alors dans les écrits officiels de l’Agence (5) à propos de ce dossier complexe qu’il s’agissait « d’un possible épisode de démyélinisation aiguë chez un enfant de moins de 2 ans (qui) ne permet pas de retenir un diagnostic de SEP et ne rejette pas le diagnostic initial de leucodystrophie ». Il est vrai que tous les examens métaboliques et génétiques réalisés chez Raphaël au fil des années permettaient d’écarter formellement ce diagnostic de leucodystrophie, maladie héréditaire dégénérative qui aurait dû sinon s’aggraver au fil du temps, ce qui n’était absolument pas le cas. La neuropédiatre (6) qui avait évoqué ce diagnostic initialement le reconnaissait d’ailleurs formellement « Cette recherche est actuellement totalement négative, ce qui ne nous surprend pas compte tenu de l’évolution ».
L’argument de l’absence de myéline chez le nourrisson qui laisserait croire que celui-ci ne risque absolument rien sur ce plan est donc manifestement totalement faux. Il est relayé par des médecins qui, soit font preuve d’une totale incompétence en physiologie du jeune enfant, soit d'une malhonnêteté intellectuelle. On entendait il y a une trentaine d’années des affirmations similaires à propos du nouveau-né et du nourrisson qui ne pouvaient pas ressentir la douleur car son système nerveux était soi-disant immature…
La myéline existe donc et se développe progressivement mais rapidement chez tous les nourrissons. Une démyélinisation peut donc se produire. Quelques rares observations sont rapportées après une vaccination contre l’hépatite B. Même si ces observations semblent exceptionnelles, il faut en tenir compte et ne pas les nier. Il faut savoir que le risque zéro n’existe pas en matière de complications post-vaccinale. On voit d’ailleurs mal pourquoi un vaccin qui déclenche parfois une SEP chez un adulte prédisposé serait totalement anodin dans les premières années de vie sur un système nerveux en voie de développement.
Dominique LE HOUÉZEC
[1] B.KOUCHNER. Débat télévisé «Le Monde de Léa» Antenne 2. 1998
[2] P.BÉGUÉ. Pédiatrie Pratique 1999. N° 104 : 8
[3] AFSSAPS «Vaccination hépatite B, mise à jour des données de pharmacovigilance» Février 2000: page 3
[4] G.PONSOT. Lettre du 2 mai 2000 aux parents de Raphaël
[5] AFSSAPS. Commission nationale de Pharmacovigilance du 29 mai 2007
[6] O.BOESPFLUG-TANGUY. E-mail du 1er novembre 2007 aux parents de Raphaël
[7] C.KREFT-JAIS. Communication personnelle du 2 décembre 2010.
[8] AFSSAPS. Compte-rendu de la Commission nationale de Pharmacovigilance du 27 septembre 2011
[9] AFSSAPS - D.COSTAGLIOLA. Etude capture-recapture dans « Vaccination anti-hépatite B. Mise à jour des données et des études de pharmacovigilance » Février 2000: pages 3-4
[10] Site de l'association REVAHB
[11] Site du CHU Pitié-Salpétrière
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