1. Signes cliniques
Forme typique :
Il s'agit d'un individu qui pense que tous les vaccins sont très efficaces et sans danger. Et qui pense dans le même temps que toutes les maladies infectieuses peuvent et doivent être éradiquées. Il pense que toutes les maladies infectieuses sont très fréquentes et très graves ou, qu'en tout cas, elles sont toutes trop fréquentes et trop graves. Il faut donc vacciner tout le monde contre tout et le plus tôt possible.
Dans cette forme typique, le sujet atteint considère que ce qu`il pense est une évidence et qu'il faut être, ou très ignorant ou tres malhonnête, pour ne pas adhérer totalement à cette position.
Formes frustes
Elles sont fréquentes et se manifestent par de nombreux petits signes :
|
Mme BACHELOT se faisant vacciner contre la grippe H1N1 |
- Croire que les informations données par le Ministère de la Santé sont des informations scientifiquement validées.
- Croire que les laboratoires producteurs de vaccins délivrent des informations dénuées d'arrieres pensées commerciales
- Ne pas s'interroger sur les différences de pratiques vaccinales selon les pays et selon les époques.
- Considérer que tous les changements survenant dans le calendrier vaccinal ont été réfléchis et débattus entre des experts compétents.
- Ne s'interroger ni sur le nom des experts, ni sur leur nombre, ni sur les conditions concrètes de leurs rencontres et de leur travail en commun.
L'examen clinique permet de retrouver un signe qui a la triple particularité d'être constamment retrouvé et de n'être jamais observé dans d'autres affections et d'être très facile à mettre en évidence : le signe du regard méprisant induit de Laenneau et Troussec. Il suffit de parler des vaccinations sur un plan technique et de demander a l'individu d'échanger sur un plan technique pour voir s'allumer dans son regard une flamme très particulière. Un mélange de mépris et d'une très grande fragilité. Comme une prière de bête traquée. Un regard qui semble dire :" Ne me parlez pas de ce sujet que je n'ai pas le courage d'aborder pour des raisons qui me dépassent".
Ce signe utile au diagnostic est essentiel à la surveillance évolutive : lorsque le sujet est capable de parler des vaccinations sans haine. sans mépris et en s'intéressant vraiment, il est guéri et la guérison est toujours définitive.
2. Les causes
ll n'y a qu'une cause et une seule : l'absence de politique de Santé publique. Devant une maladie infectieuse quelconque, le rôle des pouvoirs publics devrait être d'analyser techniquement les données du problème. lls devraient demander à des épidémiologistes, à des microbiologistes, à des cliniciens de dire ce qu'ils savent chacun dans leur domaine. lls devraient aussi les aider a travailler ensemble pour proposer une stratégie de lutte contre la maladie.
En l'absence d'analyses techniques sérieuses et organisées, les passions tendent à occuper une trop grande place.
D'autres éléments qui pourraient jouer un rôle dans la genèse du vaccinalisme ne sont en fait que les signes ou la conséquence de l’absence de politique de santé :
- absence de lieux de débats
- absence ou médiocrité des publications
- confusion entre littérature médicale et promotion publicitaire des vaccins
- faiblesse des études épidémiologiques
- manque d'intérêt des immunologistes pour les vaccins
3. Traitement
Le traitement est difficile. ll n'est pas possible de guérir un individu contre sa volonté.
Dans un premier temps, il faut le déculpabiliser. Lui expliquer que s'informer et chercher à mieux comprendre n'est en aucune façon répréhensible. Lui rappeler que Pasteur et Jenner ont eux-mêmes travaillé et réfléchi. Leur être fidèle ce n'est pas répéter inlassablement leur nom en oubliant leur oeuvre.
C'est plutôt être passionné par la complexité du vivant et par les relations au sein du vivant.
On lui donnera à parcourir d'abord (puis à lire mais il sera alors très avancé sur la voie de la guérison ) des livres. des articles, des lettres de lecteurs à différentes revues. ll découvrira que des tas de gens pensent et qu'ils semblent même éprouver du plaisir à penser.
On assiste assez souvent à une période au cours de laquelle le convalescent a envie de tout lire de tout comprendre. Phase au cours de laquelle il a envie de hurler contre les simplifications et les simplificateurs. Cette phase est souhaitable et sans danger, elle précède la phase de sérénité à laquelle chacun peut et doit accéder
Jean-Pierre LELLOUCHE
PS : Cet article a été publié dans la revue PRATIQUES du 6 Décembre 1996
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire